San Isidro - Guide Cuba - Cuba Criolla

San Isidro

San Isidro, c’est un quartier qui ne laisse personne indifférent. Situé au cœur de La Vieille Havane, il dégage une atmosphère particulière, pleine de vie, de couleurs et d’émotions. Ici, chaque rue semble raconter une histoire. On y ressent une énergie unique, à la fois intense et sincère. San Isidro n’est pas un endroit comme les autres. C’est un lieu où les choses bougent, où les gens s’expriment, où l’on sent que quelque chose se passe. Entrez dans un territoire où l’histoire, l’art, les luttes et les rêves se mêlent dans un souffle urbain inimitable.

Où se trouve San Isidro ?

Installé au sud-ouest de la Vieille Havane, San Isidro est l’un des plus anciens et des plus densément peuplés quartiers de la capitale cubaine. Avec une superficie de seulement 0,3 km², il s’étend de la rue Egido à l’Avenue du Port, et de la rue Acosta à Desamparados. Il est délimité à l’est par le port, au sud par le conseil populaire de Jesús Maria, et au nord par celui de Belén.

Caractéristiques

Longtemps considéré comme l’un des secteurs les plus modestes de La Havane, San Isidro a été marqué par la vétusté de ses bâtiments et la précarité de ses habitants, issus de milieux populaires. Pourtant, cette apparente fragilité dissimule une histoire dense et complexe, construite au fil des siècles par différentes strates sociales, culturelles et politiques.

Au cœur de ce tissu urbain, la rue San Isidro - artère principale du quartier - s’impose comme un symbole fort. Longue d’environ 600 mètres, elle est bordée de bâtiments coloniaux et néoclassiques, et demeure l’une des plus emblématiques et animées de la Vieille Havane.

Histoire

Une zone stratégique depuis l’époque coloniale

Dès le XVIIIe siècle, San Isidro occupe une position centrale dans les affaires de La Havane. Pendant le siège de la ville par les Anglais en 1762, le quartier accueille le gouvernement de l’île et le conseil de défense. Il devient l’un des huit quartiers officiels de la capitale dès 1771. En 1976, il est intégré comme un conseil populaire de la Habana Vieja.

Le quartier tire son nom de San Isidro Labrador, un saint catholique canonisé en 1622 et protecteur des terres cultivées. Une chapelle lui fut autrefois dédiée, remplacée plus tard par une église et un hospice aujourd’hui disparus.

Le quartier reste profondément attaché à ses traditions religieuses, comme en témoignent les églises historiques :

  • L’église de l’Esprit Saint, la plus ancienne de La Havane
  • L’église de la Merced, réputée pour son élégance
  • L’église et l’hôpital San Francisco de Paula.

Une terre d’immigration et de multiculturalisme

Au début du XXe siècle, San Isidro devient un refuge pour de nombreux Juifs d’Europe de l’Est, fuyant pauvreté et persécutions. Ils s’installent dans des immeubles modestes et délabrés où ils fondent des ateliers, des boutiques, et des petites manufactures.

Dans les années 1930 et 1940, une nouvelle vague de Juifs, cette fois fuyant le nazisme, rejoint La Havane et s’établit à San Isidro. Ils y créent des entreprises prospères, qui contribuent fortement à l’économie locale. Toutefois, ces commerces sont expropriés par le gouvernement après 1959, entraînant l’émigration massive de la communauté juive vers les États-Unis.

Ces apports successifs font de San Isidro un espace métissé, où traditions cubaines et influences étrangères coexistent depuis des siècles

Le passé sulfureux d’une zone de tolérance

San Isidro est aussi tristement célèbre pour avoir été, dans les premières décennies du XXe siècle, le centre de la prostitution légale à La Havane. Ce commerce florissant impliquaient des proxénètes cubains et français, et attirait une clientèle variée, dont des politiciens et des officiers de la guerre d’indépendance.

Sous l’occupation américaine, le quartier est officiellement institué comme zone de tolérance, avec un système d’hygiène et de régulation spécifique. Cette période voit la multiplication des maisons closes, qui forgent la réputation sulfureuse du quartier tout en l’ancrant dans l’imaginaire urbain havanais.

La légende d’Alberto Yarini

C’est dans ce contexte que s’impose la figure mythique d’Alberto Yarini, jeune proxénète issu de l’élite cubaine, symbole paradoxal de pouvoir et de charisme. Maître de plusieurs bordels, il règne sur San Isidro avec prestance, offrant parfois de l’argent aux enfants du quartier.

Sa rivalité avec le Français Louis Loto (souvent appelé Loto) marqua l’histoire du quartier. Tous deux se disputent le contrôle du commerce de la prostitution et l’amour de Berta, ancienne protégée de Loto. Leur affrontement culmine le 22 novembre 1910, dans un duel tragique qui coûta la vie aux deux hommes et déclencha la fameuse “guerre des portañuelas” entre proxénètes cubains et français.

La fermeture officielle de la zone de tolérance suit peu après, par le décret 964 du 23 octobre 1913. 

Mutation urbaine et mémoire populaire

Au fil du XXe siècle, San Isidro se transforme. Les maisons coloniales sont remplacées par des immeubles à étages, abritant commerces et ateliers, puis par des bureaux et entrepôts dans les années 1950, en lien avec l’activité portuaire voisine.

Malgré ces transformations, le quartier conserve son âme populaire, son patrimoine colonial et ses figures emblématiques. L’Alameda de Paula, premier boulevard de la Havane, complète ce paysage historique.

Le Movimiento San Isidro

Depuis 2018, le nom du quartier est porté par le Movimiento San Isidro, collectif d’artistes dissidents fondé par Lui Manuel Otero Alcántara. Opposé à la loi 349, qui renforce le contrôle de l’État sur la création artistique, le mouvement utilise l’art comme moyen de contestation. Performances, lectures et happenings y défendent la liberté d’expression.  

En 2020, une grève de la faim menée par plusieurs membres du collectif attire l’attention internationale sur la répression culturelle à Cuba, faisant de San Isidro un symbole contemporain de résistance artistique et de liberté.

Que voir à San Isidro ?

Un quartier entre histoire et renaissance

Longtemps marqué par la vétusté et l’oubli, San Isidro est aujourd’hui devenu un haut lieu de création artistique et un espace de mémoire vivante de La Havane. Les graffeurs, musiciens et artistes visuels ont redonné vie à ses bâtiments décrépis, transformés en galeries, ateliers et espaces communautaires. Véritable galerie d’art à ciel ouvert, le quartier séduit par ses fresques murales colorées, ses performances et son atmosphère authentique, loin des circuits touristiques classiques.

En 2021, le média Time Out classe San Isidro parmi les 40 quartiers les plus “cool” du monde, soulignant son énergie créative, sa résilience et sa capacité à se réinventer sans perdre son identité.

Le street art

Investi par d’innombrables graffitis et peintures murales, San Isidro est considéré comme La Mecque de l’art urbain cubain. Les façades des vieilles maisons se parent d'œuvres engagées, poétiques ou humoristiques, créant un musée à ciel ouvert. Si vous aimez le street art, se promener dans les ruelles du quartier est incontournable pour admirer cette explosion de créativité.

Le Museo Casa Natal de José Marti

José Marti, le père de l’indépendance cubaine, est né à San Isidro le 28 janvier 1853. Sa maison natale, située rue Leonor Pérez (Paula) n°314, entre Egido et Picota, abrite depuis 1925 un musée en son honneur.

Le bâtiment du XIXe siècle, classé monument national, arbore une façade jaune et des fenêtres bleues. Le musée expose des objets personnels, des manuscrits originaux et une reconstitution de son bureau à New York, retraçant l’enfance et la lutte révolutionnaire du héros cubain.

La Galeria Taller Gorria

Fondée par le célèbre acteur cubain Jorge Perugorria, la Galeria Taller Gorria est l’un des lieux phares du renouveau artistique havanais. L’espace met en valeur les artistes cubains contemporains les plus renommés, tels que Roberto Fabelo, Mabel Poblet, Arlés del Rio et Perugorria lui-même. Cette galerie promeut un art avant-gardiste, libre et expérimental, symbole de la modernité culturelle de San Isidro.

Les vestiges de la grande muraille de La Havane

Entre 1674 et 1797, La Havane était protégée par une muraille de plus de 3 km², érigée pour défendre la ville contre les pirates et les corsaires. Bien que détruite en 1863 pour permettre l’expansion urbaine, des vestiges subsistent encore rue Egido, à une centaine de mètres du quai de La Coubre. On peut y voir une pierre d’origine de la porte de La Tenaza, ainsi qu’un plan ancien représentant l’ensemble du rempart et de ses portes, rappelant l’importance stratégique du site.

Un quartier en mouvement

Aujourd’hui, San Isidro allie mémoire historique et vitalité contemporaine. La rue San Isidro, artère principale du quartier, concentre plusieurs lieux emblématiques : cafés, bars et restaurants créatifs, attirant artistes, habitants et visiteurs du monde entier.

Parmi les adresses phares :

  • Le bar El Chanchullero de Tapas, réputé pour son ambiance chaleureuse et ses concerts
  • La Fábrica de Arte Cubano, espace multidisciplinaire incontournable
  • Le musée Casa de África, proche du quartier, dédié aux liens entre Cuba et le continent africain.

Comment se déplacer à San Isidro ?

San Isidro peut se visiter à pied. Si marcher vous fait peur, vous pouvez recourir au service d’un taxi ou coco taxi pour l’explorer et atteindre ses différents sites touristiques.

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