Museo Girón

Le Museo Girón se trouve sur la côte sud de Cuba, à l’entrée de la péninsule de Zapata. Derrière ses murs modestes, ce musée dévoile l’un des épisodes les plus marquants de la guerre froide en Amérique latine. Ici, l’histoire ne se lit pas seulement dans les vitrines ou les photographies, elle se ressent à travers l’atmosphère de Playa Girón, théâtre de l’invasion de 1961. Découvrir ce musée, c’est plonger au cœur d'un récit national où se mêlent mémoire, idéologie et résistance.

Contexte historique

Installé à Playa Girón, sur la côte sud de la province de Matanzas, le Museo Girón retrace l’un des épisodes les plus marquants de l’histoire contemporaine cubaine : l’échec de l’invasion de la Baie des Cochons en avril 1961. Ce musée a pour vocation de préserver la mémoire d’un affrontement qui a durablement marqué les esprits, tant à Cuba qu’à l’échelle internationale.

En avril 1961, alors que les tensions de la Guerre froide divisent le monde, environ 1 400 exilés cubains, formés et soutenus par la CIA, débarquent sur les pages de Playa Girón dans le but de renverser le gouvernement de Fidel Castro, fraîchement installé depuis la chute du régime de Batista en 1959. Cette tentative de déstabilisation, orchestrée par les États-Unis et soutenue militairement, est destinée à freiner l’orientation communiste de l’île et ses rapprochements stratégiques avec l’Union soviétique.

Pendant trois jours, du 17 au 19 avril 1961, les combats font rage dans les marais de la péninsule de Zapata. Les forces armées cubaines opposent une résistance farouche. L’opération tourne rapidement au désastre pour les assaillants : près d’une centaine d’entre eux perdent la vie, et la majorité sont capturés avant d’être renvoyés plus tard aux États-Unis. Les pertes cubaines s’élèvent à plus de 170 morts et plus de 500 blessés.

L’échec cuisant de cette invasion devient alors un symbole fort pour le régime révolutionnaire, qui y voit la première grande défaite de l’impérialisme américain en Amérique latine. Le museo Girón, situé précisément sur le lieu de l’affrontement, s’impose aujourd’hui comme un mémorial dédié à cette victoire nationale. À travers ses collections, il expose les preuves matérielles du conflit. Lieu de mémoire autant que vecteur idéologique, ce musée permet de comprendre comment cet événement militaire est devenu un pilier du récit révolutionnaire cubain.

Les expositions

Le bâtiment qui abrite le Museo Girón a été construit à la fin de l’année 1959 dans un style simple. Dès 1964, ses deux salles ont accueilli une exposition photographique retraçant la réponse du peuple cubain face aux forces mercenaires hostiles à la Révolution naissante. Le lieu est ensuite agrandi et devient officiellement musée municipal le 19 avril 1976, à l’occasion des 15 ans de la bataille. Deux ans plus tard, il est reconnu Monument National, par la résolution n°3 du 10 octobre 1978, en raison de son importance historique.

Le musée rend hommage à la victoire cubaine lors de l'invasion de Playa Girón. Il montre comment les Milices Nationales Révolutionnaire, l’Armée de Libération, la Police Nationale Révolutionnaire et la Marine de Guerre ont uni leurs forces pour défendre le pays. Avec l’appui d’une aviation restreinte mais efficace, elles ont réussi à repousser, en seulement 65 heures, une force mercenaire lourdement équipée envoyée par les États-Unis.

Les deux salles d'exposition rassemblent des objets liés à ces affrontements d’avril 1961 :

• Photographies
• Cartes
• Armes
• Uniformes
• Documents
• Effets personnels.

Un film de 15 minutes, disponible pour 1 CUC supplémentaire, retrace la bataille et présente cette défaite comme la première infligée à l’impérialisme américain en Amérique latine.

Plusieurs objets emblématiques sont également exposés :

• Les grades et insignes de pilote de Luis Alfonso Silva Tablada, fondateur de la Force Aérienne Rebelle
• L’uniforme ensanglanté d’Eduardo Garcia Delgado, mort au combat après avoir écrit “Fidel” avec son sang
• Les chaussures de Nemesia Rodriguez Montaño, abîmées lors des bombardements ayant coûté la vie à sa mère
• Les effets personnels de Rolando Valdivia Fernández, artilleur de la base Granma.

Une fresque photographique présente les portraits d’environ 300 soldats cubains tombés au combat, accompagnés de leurs noms et dates. Des objets personnels et équipements militaires les accompagnent en vitrine. Certaines légendes sont bilingues.

Le musée ne se limite pas à l’exposition : il conserve le patrimoine, organise des expositions permanentes et temporaires, diffuse l’histoire locale et nationale. Il propose aussi des activités culturelles comme :

• Des conférences
• Des cours pour adultes
• Des cercles pour enfants
• Des expositions thématiques.

Le Museo Girón est actuellement en cours de numérisation. Des écrans permettent une visite virtuelle, et des QR codes, disposés près des pièces, donnent accès à des contenus complémentaires.

L’espace extérieur

En sortant du musée, vous accédez à un espace en plein air où sont exposés plusieurs vestiges militaires directement liés aux combats d'avril 1961. Cet extérieur complète la visite de manière saisissante, en donnant une échelle concrète aux moyens matériels mobilisés lors de l’invasion.

Parmi les expositions extérieures figurent des équipements de la Brigade 2506 tels que :

• Mortiers Mod-35 de 81 mm
• Mitrailleuse Browning M2 calibre 50
• Canon antichar de 75 mm
• Uniforme de campagne
• Char M41 Walker Bulldog
• Vedette motorisée de débarquement
• Camion blindé “Comando”
• Débris d’un avion B-26 abbatu

Côté cubain, on trouve des mortiers soviétiques de 82 et 120 mm, des mitrailleuses lourdes tchécoslovaques, ainsi qu’un avion de chasse britannique Hawker Sea Fury. À ses côtés, sont également présentés des restes d’un avion américain abattu, des canons, des armes lourdes et quelques bateaux ayant participé aux opérations.

Comment s’y rendre ?

Le Museo de Playa Girón est installé dans un long bâtiment de plain-pied, facilement accessible depuis la plage. Depuis la ville de Cienfuegos, il faut compter environ 1h30 de route pour rejoindre le site. Il est possible de s’y rendre en voiture, en bus ou même en autostop, bien que certaines portions de route puissent être en mauvais état.

Informations pratiques

Le musée est ouvert tous les jours, généralement de 8h00 à 17h00. L’entrée coûte environ 2 CUC. Des frais supplémentaires peuvent s’appliquer : 1 CUC pour l’utilisation d’une caméra. L’essentiel des panneaux explicatifs est rédigé uniquement en espagnol. Il n’y a pas de signalétique en anglais, ce qui peut compliquer la visite pour les non-hispanophones. Il est donc vivement recommandé de s’y rendre accompagné d’un guide local ou d’une personne parlant espagnol. Des brochures traduites peuvent parfois être disponibles sur demande.